Riche d’un répertoire de chants et d’hymnes à l’engagement et à la lutte armée contre l’occupant français, Allaoua Zerrouki (1915-1968) était un artiste dévoué à la cause nationale, mettant sa voix au service de la lutte indépendantiste algérienne. .
Né le 5 juillet 1915, Allaoua Zerrouki fut l’un des porte-parole de la guerre de libération nationale, utilisant le chant comme arme pour mobiliser militants et sympathisants autour de la noble cause de la récupération de la souveraineté pillée.
Avec une dizaine de chansons enregistrées et dédiées à la Révolution, l’artiste a animé dans son café parisien des galas dont les bénéfices ont été reversés à la Fédération française du FLN (Front de libération nationale) en soutien à la lutte armée pour l’indépendance.
Son premier album, enregistré en 1948 à Paris, était un hymne à la patrie, notamment « Ya lahbab lyoum kiffah », un appel à la révolte contre la colonisation, et bien d’autres compositions aux thèmes de l’exil, de la nostalgie et de la séparation d’avec la patrie.
Il a également enregistré « Lejwab n wassen » (la réponse de ce jour-là), hommage au colonel martyr Amirouche, tombé au champ d’honneur en 1959, et « Laalam ldzair » (le drapeau de l’Algérie), une chanson dédiée à la récupération de la souveraineté et à la condamnation de ceux qui ont prêté allégeance à l’ennemi, ou encore « Rebbi lfedhel ik mouqqer » (Seigneur, grande est ta grâce), qui dénonce la condition sociale des Algériens à l’époque.
Son engagement a été longuement évoqué par l’écrivain Rachid Oulebsir qui a révélé que l’artiste « a vendu toutes ses propriétés et terres pour participer financièrement à l’effort de guerre » pour retrouver son indépendance.
Née à Amalou, petite commune sur les hauteurs de Seddouk (Béjaia), la petite Allaoua fréquente l’école coranique du village et choisit très jeune de suivre la voie de l’art.
Il quitte son village natal pour s’installer à Akbou, puis Béjaïa, ce qui lui donne accès aux arts et aux lettres. Il y exercera une multitude de petits métiers avant d’opter pour la coiffure, ce qui lui permettra de côtoyer de nombreux artistes et musiciens dans son petit salon.
Alloua rencontrera des musiciens talentueux tels que le violoniste Boudjemaa Kadim et Baali Mahmoud, qui l’initieront aux instruments de musique, avant d’intégrer l’école andalouse de Cheikh Saddek Abdjaoui, l’un des grands ténors hawzi, où il apprendra les bases du chant.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Zerrouki Allaoua quitte le pays pour la France, où il exerce quelques petits boulots et où il rencontre de nombreux artistes algériens de son temps comme Cheikh El Hasnaoui et Slimane Azem, avant d’enregistrer son premier disque chez Pathé Marconi.
Au déclenchement de la guerre en 1954, l’artiste enregistre plusieurs chansons pour exprimer la douleur, l’amour et surtout la séparation d’avec sa femme, engagée dans la lutte armée contre l’occupant.
Rongé par les regrets, Allaoua Zerrouki a consacré plusieurs textes à la perte de sa femme, martyrisée en 1961 dans le maquis.
De retour chez lui, il organise en 1965 une tournée artistique qui le mènera dans plusieurs villes d’Algérie quelques années avant sa mort.
Pour le chercheur et spécialiste du patrimoine musical algérien Abdelkader Bendameche, auteur de « Sidi Aich », de « Yellis’N’Tmourth » (la paysanne), « El Vavor » (la barque), « A Thassekurt » (Perdrix), le grand chanteur Allaoua Zerrouki « n’aurait pas usurpé son surnom de +rossignol+ (…), son nom illumine le ciel artistique algérien à ce jour ».
De son côté, l’universitaire, journaliste et écrivain Rachid Mokhtari a mis en lumière le parcours d’Allaoua Zerrouki et sa contribution à la poésie anticoloniale dans son ouvrage « Song of Exile : Native Voices (1939-1969) ».
Allaoua Zerrouki est décédé le 17 novembre 1968, après une carrière artistique et militante vouée au service du pays qu’il a tant glorifié à travers son œuvre musicale, riche d’une vingtaine de compositions.