La Wilaya de Guelma compte 40 centres de torture datant de la période coloniale dans ses communes dont les pierres et les murs témoignent, à ce jour, de la barbarie du colonialisme français et des tortures endurées par les Algériens qui ont défié l’occupant de leurs corps nus.
Ces centres de torture, ouverts principalement entre 1954 et quelques mois avant l’indépendance, sont répartis sur 20 communes de la wilaya de Guelma, selon une liste remise par Douadi Zemali, trésorier de l’Association d’Histoire et des Monuments historiques de Guelma qui s’intéresse protéger la mémoire de la région.
Selon M. Douadi, ces centres témoignent des atrocités subies par les moudjahidines, les révolutionnaires, les musabilins et toute personne, homme ou femme, suspectée de soutenir la révolution de libération. Le décompte effectué par l’association a montré que ces centres de torture sont les quartiers généraux de la gendarmerie, de la police civile, des services de renseignement ainsi que de l’armée d’occupation, a-t-il précisé.
Moudjahid Ahmed Bousnoubra, né en 1928, se souvient encore, malgré son âge et sa maladie, de la sauvagerie des tortures qu’il a subies de la part des Français au centre de torture « Laria » à Oued Zenati, ouvert en 1955 par les autorités françaises. Moudjahid Bousnoubra a rejoint l’Armée de libération nationale en 1957 à Bouhamdane et a été fait prisonnier en 1960.
Torturé et condamné à mort avec sept (7) autres moudjahidines, il avait miraculeusement survécu à son exécution à Kef Nechem dans la région de Ras El Akba, alors qu’il devait être exécuté en même temps que Chahid Aïssousse, tombé après le champ . de l’honneur
Selon lui, les Français, aidés de traîtres, ont usé des pires formes d’exactions contre les moudjahidines tombés entre leurs mains, soit pour se venger, soit pour soutirer des informations sur les maquis de la révolution, soulignant que la torture électrique (gegene) des était le plus utilisé au centre de Laria d’Oued Zenati.
Des moudjahidines arrêtés au centre de torture de Laria s’encourageaient mutuellement à tenir bon et à ne pas être vaincus, tout comme ils se conseillaient de se mettre un bouton de vêtement entre leurs dents pour réduire l’intensité du courant électrique sur le corps, selon M. Bousnoubra.
Le centre de torture du village de Chorfa Ahmed ou Bled Ghefar dans la commune de Boumahra Ahmed était aussi l’un des centres de torture français les plus « barbares », selon les habitants de cette localité qui ont assuré que plusieurs des héros de la révolution libératrice ont été passés. sous la torture dans ce centre, refusant obstinément de se soumettre.
Les centres de torture de Dhaayat Lafi à Héliopolis et Oued Cheham n’étaient pas moins connus pour leurs pratiques ignobles.
Selon les témoignages des proches des moudjahidines décédés qui séjournaient dans ces centres, parmi les pires abus pratiqués par les tortionnaires figurait la pratique consistant à attacher la personne nue à un mur et à mettre les pieds dans l’eau pour en augmenter l’intensité. de courant électrique.
Une autre torture consistait à placer des électrodes sur les parties les plus sensibles du corps, y compris les oreilles, ou à placer la victime dans une bassine d’eau ou sur une chaise en métal avant de faire passer le courant dans celle-ci.
L’eau et le feu faisaient également partie des techniques de torture utilisées, mais la plus horrible, disent les mêmes sources, était la torture du verre.
Maintenir des centres de torture pour dénoncer les crimes coloniaux
Pour des historiens dont Souad Haddad et Abla Saoudi du Département d’Histoire de l’Université de Guelma, le colonialisme français a créé un grand nombre de centres de torture à Guelma car la région était un passage pour les caravanes de moudjahidines se rendant en Tunisie pour transporter des armes au profit de la Révolution dans le pays voisin.
Les caravanes ont emprunté deux itinéraires principaux, celui de Maouna ou celui de Houara, ce qui a conduit l’armée coloniale à multiplier les représailles contre les habitants de ces régions transformées en « zones interdites », selon les deux historiens qui notent que l’armée française y a recouru. par tous les moyens, y compris la torture, pour obtenir des informations sur les mouvements des moudjahidines.
Une visite de plusieurs centres a montré que certains de ces bâtiments historiques sont devenus des propriétés privées, tandis que d’autres sont en mauvais état, comme le centre Chorfa Ahmed et celui d’Oued Zenati.
Cette situation appelle à s’intéresser à leur restauration et à leur préservation en tant que vestiges de la mémoire collective des Algériens qui révèlent la barbarie du colonialisme français et révèlent les immenses sacrifices consentis par les Algériens lors de la lutte pour l’indépendance.
De son côté, le directeur du musée moudjahid de Guelma, Yacine Chaâbane, regrette que le musée ne dispose pas de beaucoup d’objets et de moyens utilisés lors des tortures pratiquées dans ces centres et cités par les historiens ou les témoignages vivants des victimes, avec la exception des gènes qui ont été utilisés pour la torture électrique.