Le fondateur de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), Aissat Idir, était un leader en toutes circonstances, avoue le moudjahidine Amar Hadj Saïd, dont le sort a croisé celui du dirigeant syndical de la prison coloniale de Bethioua en Oranie.
Réuni à Tizi-Ouzou à la veille des 66 ans du syndicat, l’ancien moudjahidine se souvient du « charisme et de l’intelligence » du fondateur de l’UGTA et de « son engagement constant à protéger les détenus au détriment de lui-même ».
Dès son arrivée à la prison de Bethioua, qui comptait environ 1.500 détenus, en compagnie d’autres syndicalistes, dont le Dr Boukadoum et Madjid Ali Yahia, Aissat Idir s’est efforcé d’aider les détenus dans leurs petites difficultés quotidiennes administratives et aussi de les organiser.
« Il s’est rapidement imposé comme une interface entre les détenus et l’administration pénitentiaire en écrivant notamment leurs courriers et en les défendant à chaque fois que l’un d’entre eux subissait une injustice, ce qui remontait le moral des détenus et encourageait leurs convictions », avoue-t-il. Hadj. Mentionné.
Très vite, l’administration pénitentiaire, agacée par l’activisme et l’autorité grandissante d’Aissat Idir et de ses compagnons sur les détenus, procède à l’édification d’un mur de séparation entre eux.
=== Une cour spéciale pour isoler Aissat Idir du reste des prisonniers ===
« Ils ont installé une cour spéciale pour Aissat Idir et ses compagnons afin de les séparer du reste des prisonniers, mais trois jours plus tard, tout en trouvant les outils de construction sur place, ils ont détruit le mur dans la nuit et sont retournés dans la cour des prisonniers », raconte-t-il.
Il se souvient également du rôle joué par Aissat Idir et ses compagnons lors de la grève de la faim organisée par les détenus en soutien à la grève de 8 jours convoquée par le Comité de coordination et d’exécution (CEE) du Front de libération nationale (FLN) entre janvier 28 et 7 février 1957 pour manifester le soutien du peuple à la révolution de libération et aux tortures subies par lui et ses camarades.
« Pendant la grève, Aissat Idir a mobilisé les détenus et les a convaincus de l’importance de soutenir cette grève en lançant une grève de la faim en prison. Un slogan auquel tous les détenus ont adhéré », se souvient-il.
Aissat Idir et ses camarades ont ensuite été isolés et torturés à la flamme.
« Je me souviens de son retour en cellule, affaibli, noir et saignant de toutes parts des sévices subis », se souvient l’ancien détenu.
Un peu plus tard, et face à son entêtement à défendre la cause des détenus, il est emmené vers une destination inconnue. Certains disent qu’il a été transféré à Berouaghia dans la wilaya de Médéa et d’autres à Aflou dans la wilaya de Laghouat.